Jésus et les femmes

BIANCHI ENZO

Bayard

18,90 €



Enzo Bianchi s’exprime librement, avec un ton libre mûri par la force des années. Les phrases sont simples et claires, mais le message est profond et révolutionnaire. Dans son livre « Jésus et les femmes » l’auteur prête une attention nouvelle aux multiples rencontres entre le Christ et celles qui ont croisé sa route. En tant que moine bénédictin dans une communauté mixte, il a vu l’Eglise catholique évoluer ces 50 dernières années. Il a observé des changements mais reconnaît aussi ce qui n’est pas encore. Au milieu de ces mutations, Bianchi souhaite rappeler la subversivité avec laquelle Jésus a rencontré les femmes. La radicalité nouvelle avec laquelle il a rencontré chacune d’entre elles. Il entend observer les relations de Jésus pour mieux apprendre à le connaître.

Les femmes laissent souvent très peu de traces dans l’histoire. Dans les évangiles les femmes apparaissent furtivement et de façon voilées, cachées comme cela est d’usage dans cette époque. Il ne faudrait pas en déduire pour autant qu’elles étaient absentes, « les femmes étaient oubliées dans la tradition orale et dans l’écriture, toujours confiée aux hommes comme seuls interprètes autorisés des événements et de l’histoire. » (p.15) Pourtant les femmes étaient présentes autour de Jésus. Dans la culture juive où enseigner « la Torah à sa fille, c’est comme enseigner des choses sales » (Mishnah, Sotah, 3,4) l’attitude de Jésus tranche de façon radicale.


Jésus et les femmes

Jésus et les femmes dans les Evangiles synoptiques

L’évangile de Matthieu, de Marc et de Luc mentionnent différentes rencontres mais il est frappant de constater que contrairement aux usages de son temps Jésus ne fait pas de discrimination entre les hommes et les femmes. Il encourage chacun et chacune à le suivre, lui, le Rabbi. La communauté de Jésus était composée de 12 hommes et de quelques femmes. Qui sont-elles ? Enzo Bianchi les passe une par une en revue en prend le temps de connaître chacune d’entre elles : la femme qui souffrait d’hémorragie, la femme étrangère, la veuve de Naïn, la pécheresse chez Simon le pharisien, Marthe et Marie, la femme courbée, la veuve pauvre et la femme anonyme qui a oint Jésus à Béthanie, sans oublier les femmes présentes après la résurrection.

Jésus et les femmes dans l’évangile selon Jean

L’apôtre Jean attribue aux femmes une place toute particulière. Il en nomme d’autres, comme la samaritaine, la femme surprise en délit d’adultère ou Marie de Magdala. Jean décrit chacune d’elles avec une puissance paradigmatique qui dépasse sa propre existence. Pourtant, dès la fin des évangiles, les femmes disparaissent. Bien sûr, certaines sont encore nommées, mais font-elles encore partie du grand mouvement d’évangélisation ? « Vous êtes tous frères et sœurs » (Mt 23.8) avait annoncé Jésus. Cependant, comme l’a détaillé Michel Gourgues, la nouveauté « s’est heurtée à l’inculturation de l’évangile dans le monde hellénistique, et aussi au lourd héritage du judaïsme pharisien. » Progressivement, l’égalité proclamée et vécue dans les relations de Jésus a cédé la place à l’invisibilisation des femmes et à leur silence. L’affirmation de l’apôtre « En Christ, il n’y a plus ni Juif ni Grec […] ni mâle ni femelle » (Ga 3.28) a peu à peu cessé de façonner les communautés chrétiennes.

Face à ce constat, Enzo Bianchi appelle l’Eglise à redécouvrir le trésor du rapport entre Jésus et les femmes et à s’en saisir avec courage : « Il serait surtout nécessaire que l’Eglise, les Eglises, sans peur, puissent à nouveau simplement s’inspirer des paroles et de l’attitude de Jésus à l’égard des femmes, en assumant ses pensées, ses sentiments, ses attitudes à la fois très humaines et déterminantes aussi pour la forme de la communauté chrétienne et des relations vécues en son sein entre hommes et femmes, qui désormais dans le Christ, ne font plus qu’un. »




Marie-Noëlle Yoder