Dictionnaire patois de Canaan français

Ike O'Noclast

Thierry Hernando éditeur

248 pages

2016

18€


Par l'humour, Thierry Hernando alias Ike O'Noclast (tout est dit dans le jeu de mots) apporte un oeil critique sur notre manière de communiquer à l'intérieur des églises.

Il est journaliste et a travaillé dans de nombreux médias protestants. Il a aussi fréquenté les bancs de nombreuses églises de toutes les dénominations du protestantisme : baptiste, réformé, évangélique, pentecôtiste, adventiste... Et à chaque fois, son constat est le même : nous utilisons un jargon peu accessible à ceux qui ne connaissent pas encore Jésus.


Ce livre est plus qu'un dictionnaire humoristique, il revèle à ses lecteurs tous les enjeux de la communication pour évangéliser hors des murs de l'église.

 

"L'Eglise doit réapprendre à communiquer"

   



 

Thierry Hernando définit avec beaucoup de second degré 333 expressions issues de la Bible ou des milieux religieux pour exprimer les spécificités de la vie chrétienne qui se détache de la mentalité du monde (comprendre le monde qui s'est rebellé contre Dieu) : briser les liens, croisade d'évangélisation, cure d'âme, fraternellement, vieil homme, occultisme....

  

"On peut pardonner et guérir par l'humour"

  

Son avant-propos prend mille précautions pour ne blesser personne mais il explique aussi que l'on peut être offensé dans une assemblée chrétienne. Thierry Hernando confiait dans une interview accordée à Info chrétienne qu'écrire ce dictionnaire a été pour lui une forme de thérapie.

D'autres livres comme Alors tu ne veux plus aller à l'église, Emmener ses enfants à l'église sans qu'ils ne rejettent Dieu ou encore le livre de Philippe Yancey : Déçu par l'Eglise abordent cette question. Thierry Hernando s'est aussi inspiré des ouvrages Crises de foi qu'il cite dans la bibliographie de ce dictionnaire.




A travers ce dictionnaire, l'auteur critique les systèmes humains divisés en dénominations et il rejette toutes les étiquettes écclésiales. La relation personnelle à Jésus prime sur la pratique religieuse et cela commence par les mots.

En tant que journaliste, Thierry Hernando considère Jésus comme un excellent communicant qui savait parler de manière simple et efficace à ses disciples dans son ministère grâce aux paraboles de la vie quotidienne que chacun comprenait qu'il soit riche ou pauvre, illétré ou savant.




Illustrations de Guido reproduites dans le dictionnaire Patois de Canaan. Droits réservés.

   

La lecture de ce dictionnaire m'a donné à réflechir. Autant, j'ai apprécié à juste titre la réflexion de l'auteur sur la manière de parler du Royaume de Dieu à ceux qui ne le connaissent pas encore, autant j'ai été sceptique face à la portée de ce livre : faire rire et divertir, faire réfléchir pour faire évoluer l'accueil des nouveaux paroissiens?...

L'auteur avance la thèse que notre propre communication déroute tellement les gens qu'ils n'osent entrer dans l'église.


Mais pour moi,  on ne peut dire autre chose que "briser les liens", "l'onction de Dieu", "les fruits de l'Esprit"... Sinon cela reviendrait à ne pas différencier le message de l'Evangile du message séculier. La foi chrétienne prône une contre-culture totale du monde extérieur notamment à travers ses mots.


J'ai été amusée par la définition du mot "Wah" qui revèle un mauvais tic de langage de certains prédicateurs pour être dans l'air du temps. Mais j'ai aussi été un peu destabilisée par le ton très caustique des définitions qui, à force de second ou de troisième degré, versent dans la caricature de l'Eglise à grands traits.


J'aurai apprécié que ces définitions abordent aussi ce que l'auteur aime dans les églises , en quoi la communion fraternelle et l'amour du prochain sont des choses précieuses qui font la richesse humaine de l'Eglise.


Peut-être ce sera le cas dans le prochain tome puisqu'il est en préparation.


Je vous recommande donc ce dictionnaire qui nous invite à réfléchir, prendre du recul sur nos tics de langage que l'on soit chrétien de longue date ou nouveau converti pour se poser la question : est ce que je suis compréhensible quand je témoigne de ma foi dans la rue, dans le métro, à mon travail ?.



 Margot Dimitrov