Mis à part la biographie d'Eternity Publishing "Tel que je suis", 1997 dont on ne sait pas si elle fut écrite par Billy Graham (parue au Etats-Unis en 1995 et révisée en 2007), il n'existe pas de biographies sérieuses en français sur Billy Graham. On peut donc saluer l'initiative des éditions de Jeunesse En Mission pour cette biographie.

 

 

  

  

 

   

Billy Graham. Le pasteur de l'Amérique, Geoff & Janet Benge,  

JEM éditions, 2021, 199 p. 18.90 € 

  

Tous les événements importants de la vie du "pasteur de l'Amérique" se retrouvent dans ce livre : ses origines rurales, sa conversion, ses études, les débuts de son ministère avec Youth for Christ en 1944 (mieux connu en France sous les initiales de J.P.C., Jeunesse Pour Christ), dont il est le premier salarié à temps plein, puis la grande campagne de 1949 à Los Angeles qui va le faire connaitre des médias et qui va durer 8 semaines, au delà de ce qui était prévu. C'est d'ailleurs lors de cette campagne qu'un certain Louis Zampérini se convertira, personnage dont Angélina Jolie a fait le biopic "Invincible".

 

 

  Geoff & Janet Benge

 

Le livre nous gratifie aussi de quelques détails amusants comme lors de ce séjour en France en 1946 où n'ayant pas assez d'argent pour se payer sa chambre d'hôtel, Billy Graham fera du troc avec des bas de nylon qu'un homme d'affaire américain lui avait donnés avant de partir (pp. 68-69).

 

Ce livre n'a pas le caractère hagiographique de certaines vies de saints comme parfois le catholicisme peut en produire - bien que cette collection de biographies s'intitule "Les Héros de la foi". On pourra regretter une écriture lisse qui donne parfois l'impression de justifications sur les prises de positions contestables de Billy Graham notamment sur ses relations parfois ambigües avec certains présidents (Nixon) ou l'interaction entre le politique et le religieux, ce qui en Occident est difficilement décryptable. Sébastien Fath a très bien analysé ce phénomène dans son livre, Billy Graham, pape protestant ?, aux éditions Albin Michel (2002).

  

Il faut effectivement avoir la grille de lecture d'un sociologue spécialiste des mouvements évangéliques aux Etats-Unis pour comprendre cette phrase aussi décomplexée de nos 2 auteurs sur la figure emblématique de Billy Graham : "Billy Graham était maintenant considéré comme un trésor national par de nombreux américains" (p. 183, c'est nous qui soulignons). D'ailleurs de son vivant, ce qui est assez étonnant, on lui a construit une sorte de musée (library) dont l'inauguration eut lieu en 2007 en présence de plusieurs anciens chefs d'état de l'Amérique qui prononcèrent d'élogieux discours à son encontre (Carter, Bush et Clinton). C'est avec humour que lors de cette inauguration, il commença son discours par ces mots "J'ai l'impression que j'assiste à mes funérailles".

  

Conclusion : un livre complet puisqu'il retrace toutes les étapes de la vie de Billy Graham jusqu'à sa mort en nous donnant certains détails du contexte politique et social de l'époque et qui nous fait mieux appréhender ce qu'on appelle "la religion civile" américaine avec cette étonnante imbrication de la foi avec la politique. On reste tout de même sur notre faim en refermant ce livre car on ne parle pas de l'influence culturelle et religieuse énorme et à mon sens positive, qu'exerça le ministère de Billy Graham dans ce pays tout au long de cette deuxième moitié du XXème siècle, notamment le renouveau du mouvement évangélique et missionnaire des églises états-uniennes.

   

Thierry Rouquet